William T. Vollmann
L’obsession de comprendre le monde
, le 11 mars 2014
Le journaliste, essayiste et surtout romancier William T. Wollmann ne s’est jamais contenté d’observer les vrais problèmes de loin. Loin de se payer de mots, l’homme au physique franchement ingrat, qui ne se cache pas de fréquenter des prostituées, a très tôt pris son appareil photo et son enregistreur à bandes pour couvrir les grands conflits de la planète avec une obsession : comprendre, et un seul ennemi : les idées reçues.
A 22 ans, William T. Vollmann, originaire de Los Angeles et spécialiste de littérature comparée, fait divers petits boulots pour financer un voyage en Afghanistan, où il se confronte à la guerre, à la misère, interviewe les mujahidins, tous les participants au conflit, sans jugement a priori. Nous sommes en 1982. Dix ans plus tard paraît An Afghanistan Picture Show, or, How I Saved the World, un titre caractéristique du côté un brin cynique que se donne Vollmann : probablement une manière pour un grand sensible de ne pas tomber dans le pathos et de se protéger. Il renouvellera ce genre d’expérience au Cambodge, au Kosovo, en Somalie, en Irak et récemment à Fukushima, toujours attentif à tous les sons de cloche et en évitant les conclusions hâtives.
S’il écrit par la suite pour des journaux plutôt grand public (Esquire, Harper’s Magazine, The New Yorker et même Playboy), il le fait sans complaisance. Et c’est son activité de romancier, basé sur des enquêtes conséquentes (une forme de "tradition américaine" allant de Truman Capote à Don DeLillo) qui l’occupe en priorité, dans une veine sociale steinbeckienne sans misérabilisme (Des putes pour Gloria, 2000) ou historique (Central Europe, 2005).
Fort de son expérience et volontiers provocateur (mais pas gratuitement), Vollmann n’hésite pas à se faire l’avocat du Diable : après le massacre de Columbine, en plein débat sur la vente libre des armes, il rappelle qu’à certains endroits de la planète, posséder des armes et être en mesure de se défendre est, pour les populations civiles, une question de survie.
Et nous ne sommes pas à une surprise près avec Vollmann : pratiquant la photographie à ses heures perdues (notamment des portraits de prostituées de Los Angeles tirés au platine), c’est par ce médium que Vollmann a révélé un aspect inattendu de sa personalité : le goût pour le travestissement.
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